Première lecture du lundi 5 Juillet 2021
Jacob quitta Bersabée et partit pour Harân. Il arriva d’aventure en un certain lieu et il y passa la nuit, car le soleil s’était couché. Il prit une des pierres du lieu, la mit sous sa tête et dormit en ce lieu. Il eut un songe : Voilà qu’une échelle était dressée sur la terre et que son sommet atteignait le ciel, et des anges de Dieu y montaient et descendaient !
Voilà que Yahvé se tenait devant lui et dit : « Je suis Yahvé, le Dieu d’Abraham ton ancêtre et le Dieu d’Isaac. La terre sur laquelle tu es couché, je la donne à toi et à ta descendance. Ta descendance deviendra nombreuse comme la poussière du sol, tu déborderas à l’occident et à l’orient, au septentrion et au midi, et tous les clans de la terre se béniront par toi et par ta descendance. Je suis avec toi, je te garderai partout où tu iras et te ramènerai en ce pays, car je ne t’abandonnerai pas tant que je n’aie accompli ce que je t’ai promis. »
Jacob s’éveilla de son sommeil et dit : « En vérité, Yahvé est en ce lieu et je ne le savais pas ! » Il eut peur et dit : « Que ce lieu est redoutable ! Ce n’est rien de moins qu’une maison de Dieu et la porte du ciel ! » Levé de bon matin, il prit la pierre qui lui avait servi de chevet, il la dressa comme une stèle et répandit de l’huile sur son sommet. À ce lieu, il donna le nom de Béthel (c’est-à-dire : Maison de Dieu), mais auparavant la ville s’appelait Luz.
Jacob fit ce vœu : « Si Dieu est avec moi et me garde en la route où je vais, s’il me donne du pain à manger et des habits pour me vêtir, si je reviens sain et sauf chez mon père, alors Yahvé sera mon Dieu et cette pierre que j’ai dressée comme une stèle sera une maison de Dieu. »
Genèse 28, 10-22
Méditation
Voilà une histoire d’amour à grande échelle qui se vit sur deux dimensions, la verticalité et l’horizontalité : Jacob est étendu sur le sol, sur la terre qui déjà lui sera dévolue, à lui et à sa descendance, son cœur bat contre cette terre, son souffle s’anime, va et vient contre ce sol déjà béni, tout son être s’imprègne des émanations telluriques de ce site, habité par Celui dont il ne peut pas encore soupçonner la Présence.
C’est ainsi qu’il sera gratifié d’un songe : il perçoit que le fini est relié à l’Infini par une échelle mystérieuse reliant le terrestre au Divin, laquelle échelle lui permet de communiquer avec Celui-ci. Cette communication est établie par des anges qui vont et viennent le long de cette échelle ; étrangement, ils ne descendent pas du ciel, mais ils y montent. Ces anges seraient donc parmi nous ? Ne sont-ils pas les engendrés des Béatitudes : les pauvres en esprit, les doux, les affligés, les affamés de justice, les miséricordieux, les cœurs purs, les artisans de paix, les persécutés pour la Justice… et puis les préférés de Jésus, les pauvres, les petits, les boiteux, les malades, les lépreux, les estropiés, les aveugles… et puis les publicains et les prostituées qui ont cru au Royaume… Mais alors, ceux qui descendent, qui sont-ils ? Ne seraient-ils pas le reflet de ce que sont devenus ceux qui montaient, une fois accueillis au Royaume, réverbération, miroitement qui serait projeté vers les femmes et les hommes qu’ils ont quittés pour les gonfler d’Espérance ?
La tête de Jacob repose sur une pierre, préfiguration, promesse, de ce qui va advenir pour lui et son lignage : comme est solide cette pierre, ainsi sera solide, résistante, immuable, pérenne, la bénédiction de Dieu, bénédiction que Jacob va concrétiser par l’onction d’huile qu’il versera sur la pierre de Béthel, désignant la Maison de Dieu.
Quant à Jésus – nous a dit celui-ci –, il n’avait même pas une pierre pour reposer sa tête. Et ce n’est donc pas sur cette pierre absente qu’Il a fait couler l’huile de Bénédiction, c’est sur la Croix, où reposa sa tête, que couleront le Sang et l’Eau scellant ainsi l’Alliance Éternelle, ouvrant les portes de la Maison de Dieu où chacun sera accueilli à Sa suite à l’heure de sa mort, gravissant dans l’exaltation et l’action de grâce, l’échelle mystérieuse et lumineuse conduisant au Royaume Éternel.
Laissons donc reposer nos têtes sur la pierre, la Pierre Angulaire sur laquelle tout se construit.
Jean-Marie Martin, prêtre de l’Oratoire à Paris
Version pdf imprimable N&B en format A4 :
Illustration : Le Songe de Jacob, Marc Chagall, Musée national Marc Chagall, Nice