« En formant le premier Adam, Dieu pensait au second »
Une méditation de Pierre de Bérulle.
Une méditation de Pierre de Bérulle.
[…] Et aussi me semble-t-il que Dieu, qui voit les choses futures dans les présentes,
voyait en cet œuvre de la Création celui de l’Incarnation, et se plaisait à penser au second Adam
en formant le premier,
et à manier de ses mains cette pièce de terre, […] qu’il voulait un jour vivifier de l’esprit de sa divinité, et unir à soi en lui communiquant et imprimant,
non sa semblance,
mais son essence, […] et sa divinité.
Aussi y a-t-il un grand rapport entre l’œuvre de la création de l’homme
et celui de l’Incarnation du Verbe, comme en deux excellents œuvres, l’un suprême en l’ordre de la nature l’autre suprême en l’ordre de la grâce.
Car comme en la création de l’homme il y a mélange, il y a mélange aussi en l’Incarnation.
[…] Comme ce premier mélange est de deux natures, l’une spirituelle, l’autre corporelle,
ce second mélange est de deux natures, et bien plus différentes,
l’une divine, l’autre humaine; l’une créée, l’autre incréée.
[…] aussi de la divinité et de l’humanité jointes ensemble, résulte un divin composé, qu’est Jésus.
Pierre de Bérulle in GR XI, t. 7, p. 426.
Pour Bérulle, Jésus est le second Adam, qui inaugure une nouvelle création dans une humanité renouvelée. Ainsi, l’Incarnation n’est pas un « accident », mais fait, dès l’origine, partie intégrante du dessein de Dieu sur la création.
En effet, Dieu ne peut pas se contenter de laisser l’homme dans l‘«ordre de nature», la toute-puissance de son amour veut introduire sa créature dans l’« ordre de la grâce », et pour ce faire il veut lui-même, en la personne du Verbe Jésus, se révéler en prenant part à cette humanité qu’il a voulue. En l’Incarnation, la Trinité s’ouvre jusqu’à l‘humanité tout entière, si celle-ci veut bien se laisser déifier.