« Caïphe n’est pas mort »
Méditation biblique du P. Michel Dupuy
Évangile du samedi 9 avril 2022
Beaucoup de Juifs, qui étaient venus auprès de Marie et avaient donc vu ce que Jésus avait fait, crurent en lui. Mais quelques-uns allèrent trouver les pharisiens pour leur raconter ce qu’il avait fait. Les grands prêtres et les pharisiens réunirent donc le Conseil suprême ; ils disaient : « Qu’allons-nous faire ? Cet homme accomplit un grand nombre de signes. Si nous le laissons faire, tout le monde va croire en lui, et les Romains viendront détruire notre Lieu saint et notre nation. » Alors, l’un d’entre eux, Caïphe, qui était grand prêtre cette année-là, leur dit : « Vous n’y comprenez rien ; vous ne voyez pas quel est votre intérêt : il vaut mieux qu’un seul homme meure pour le peuple, et que l’ensemble de la nation ne périsse pas. » Ce qu’il disait-làne venait pas de lui-même ; mais, étant grand prêtre cette année-là, il prophétisa que Jésus allait mourir pour la nation ; et ce n’était pas seulement pour la nation, c’était afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés. À partir de ce jour-là, ils décidèrent de le tuer (…).
Jean 11, 45-57
Méditation
« Caïphe n’est pas mort »
Faut-il m’excuser de me laisser emporter ? Alors je m’excuse mais n’en pense pas moins.
Caïphe n’est pas mort. Des Caïphe lui succèdent àtravers les siècles, personnels ou collectifs, cherchant àfaire mourir Jésus, volontairement ou par maladresse, le crucifiant en portant atteinte àla foi des croyants.
Le monde d’abord, par son antichristianisme affiché, larvé ou sournois, s’attaquant au message chrétien habitant le croyant, le ridiculisant, le moquant, ou plus socialement ces puissants, voire le simple citoyen, oubliant l’exclu, le pauvre, le « déchet humain » dirait François, trahissant ainsi l’homme de Galilée àtravers eux, crucifié.
L’Eglise n’est pas en reste, du moins l’institution. Combien de morts sur son chemin sous prétexte de vérités (!) àdéfendre. Le Grand Inquisiteur de Dostoïevski en étant le plus bel exemple. Prosélytisme criminel, témoignages contrefaits, hypocrisie sacralisée faisant fuir les hommes en quête d’amour, ne voyant pas en certains responsables, en certains « princes », ou « pasteurs » les témoins de l’homme de Galilée, par eux crucifié, une nouvelle fois.
Moi-même sans vouloir la mort de Jésus mon frère, ne suis-je pas responsable de sa mort quand mes actes ne sont pas en cohérence avec ma foi ? Mes sectarismes, mes certitudes affichées, mes jugements, mon cléricalisme, bien que je m’en défende, tout ce qui dans ma vie m’empêche d’être serviteur sous prétexte d’une fausse sacralité, me faisant oublier la mission de service que m’a demandée l’homme de Galilée, trahi une nouvelle fois par le Caïphe que je suis, en le tuant, croyant parfois le servir.
Héritiers de Caïphe, prêtres, religieux, baptisés, demandons pardon ; et que la miséricorde de Celui dont nous trahissons le message nous donne de Le rejoindre en vérité retrouvée.
Michel Dupuy, prêtre de l’Oratoire àla Valfine, Jura
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Illustration : Jésus est interrogé par le grand prêtre Caïphe, William Hole, 1900-1906
