T.J. : Comment est né ce cycle de conférences ?
G-H.M. : Tout est parti d’une invitation lancée par le père Nicholson à François Perrot, un paroissien, pour qu’il vienne nous parler de son activité professionnelle autour du logement abordable dans les pays émergents. Cela m’a évoqué la première encyclique du pape François, Laudato si’, et il me semblait qu’un des thèmes qui pouvait structurer une réflexion était « Habiter la maison commune ». Nous avons ainsi développé quatre moments, d’un côté très directement autour de Laudato si’ : la maison commune, en prendre soin, mais aussi l’habiter. Par ailleurs j’ai songé à Amoris Laetitia, pour les enjeux humains. J’ai demandé à sœur Véronique Margron de venir nous parler d’une culture de l’hospitalité, car cette maison commune, on l’habite ensemble. Pour la fin du cycle, nous voulions avoir une réflexion de fond sur la construction de l’être humain comme être aimant et c’est là que nous avons pensé au père Thomasset.
T.J. : Quel était le message de chaque intervenant ?
G-H.M. : Le premier était Jacques Arnould, à la fois scientifique et théologien. Il nous a apporté une passionnante histoire de la formation du regard sur la Terre vue du ciel. Il nous a aussi ouverts à une prise de conscience de la petitesse de notre maison commune dans le vaste espace intersidéral. La deuxième était sœur Véronique Margron qui a apporté un moment de sensibilitéen confrontant deux choses: l’impératif évangélique et non négociable de l’hospitalité à offrir au prochain, et puis la réalité de nos moyens. A une époque où les flux migratoires mettent en question nos capacités d’accueil et notre culture de l’hospitalité, il y avait là des éléments de réflexion et d’encouragement à oser faire sinon l’impossible du moins tout notre possible. La conférence de François Perrot a apporté un témoignage personnel de sa vie professionnelle au sein d’une grande entreprise qui peut mettre les moyens dont elle dispose au service d’autre chose que le bénéfice à tout prix. Il a témoigné de deux aspects : procurer à ceux qui n’en ont pas les moyens des logements qui soient abordables et décents, et puis l’aspect écologique de ces constructions. Quant au père Thomasset, il s’est interrogé sur « comment grandir dans l’amour? », à michemin entre le discours éthique et le discours proprement spirituel. Pour que l’être puisse agir conformément aux appels de l’Evangile il faut qu’il se structure pour s’exprimer et porter du fruit.
T.J. : Ces conférences ont nourri la réflexion des paroissiens. En quoi nourrissent-elles leur foi ?
G-H.M. : La préoccupation que l’on a est toujours la même: donner à penser. J’aime citer le cardinal Martini qui interrogeait les croyants : « Vous croyez, mais est-ce que votre foi vous donne à penser? ». C’est très important de découvrir que la foi est une puissance qui apporte des points d’appui, mais elle pousse à s’interroger et à relever des défis. Et on ne peut pas relever des défis sans prendre le temps de réfléchir. En ce sens, une authentique réflexion – comme celle menée cette année – nourrit la pensée. Elle a en même temps des retombées considérables sur notre foi qui doit être consciente d’ellemême, en prenant la mesure des défis et en se donnant les moyens de les relever.
[Source : Forum Saint-Eustache, printemps 2018 / #48]